L’histoire du temps présentNovembre 1941: „Je pensais sincèrement suivre le droit chemin“

L’histoire du temps présent / Novembre 1941: „Je pensais sincèrement suivre le droit chemin“
Das Gemeindehaus von Esch unter Nazi-Flaggen Foto: Musée National de la Résistance

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Il y a exactement 80 ans, la section de la Volksdeutsche Bewegung (VdB) pour les Luxembourgeois de France était intégrée au parti nazi. Cet événement avait lieu au moment où la politique de germanisation prenait au Luxembourg un tournant plus agressif. Ce qui se passait dans leur pays d’origine affectait donc aussi les expatriés luxembourgeois dans le pays voisin. Ils représentent ainsi un échantillon intéressant pour mieux comprendre le phénomène de la collaboration.

La cérémonie qui eut lieu le 16 novembre 1941 à Paris, au Quay d’Orsay – le siège historique du ministère français des Affaires étrangères – était plutôt inhabituelle et, alors même que la frontière la plus proche avec ce pays était située à plus de 350 km, elle avait un lien direct avec le Luxembourg. Deux éminents représentants du régime nazi qui y avait été instauré près d’un an et demi auparavant avaient d’ailleurs fait le déplacement: l’Allemand Friedrich Reckmann, proche collaborateur du Gauleiter Gustav Simon, et le Luxembourgeois Damien Kratzenberg, chef – du moins en principe – de la VdB.

Les deux hommes prirent la parole face à un parterre de 500 personnes, venues assister à l’incorporation officielle dans l’Auslandsorganisation du parti nazi (NSDAP/AO) de la section française du mouvement collaborationniste Volksdeutsche Bewegung. Cette dernière avait été fondée six mois plus tôt à l’intention des Luxembourgeois installés en France. Il s’agissait de l’une des deux sections étrangères de la VdB. L’autre, en Belgique, fut d’ailleurs elle aussi absorbée par la NSDAP/AO à cette époque.

La communauté luxembourgeoise en France

La récupération par le parti nazi des sections étrangères de la VdB répondait probablement à la même logique que le recensement organisé un mois auparavant au Luxembourg par les autorités allemandes. Ces dernières avaient décidé de hâter l’intégration des „Volksdeutsche“ luxembourgeois dans la „Volksgemeinschaft“, de faire d’eux des Allemands comme les autres, avec le même statut, les mêmes droits – et les mêmes devoirs – et cela était aussi valable pour ceux d’entre eux qui vivaient en dehors de leur pays natal.

Avant la Deuxième Guerre mondiale, le Grand-Duché était certes déjà un pays d’immigration, c’était même dès cette époque l’un des pays européens qui avaient la plus forte proportion d’étrangers. Mais contrairement à aujourd’hui, c’était aussi un pays d’émigration qui, au-delà de ses 290.000 habitants, avait aussi une diaspora importante dans les pays voisins ainsi qu’en Amérique du Nord. En 1936, près de 8.000 Luxembourgeois vivaient ainsi en Lorraine, pour la plupart dans le département de la Moselle, et près de 3.500 à Paris et dans sa banlieue.

Au regard de l’idéologie nazie, ils constituaient un capital racial de qualité supérieure – puisque de sang allemand – dont l’hémorragie avait affaibli l’organisme du Reich et, à l’inverse, renforcé l’ennemi héréditaire français ainsi transfusé. Plus pragmatiquement, cette communauté pouvait toutefois servir de relai à la puissance allemande en France. Quant à Gustav Simon, il voyait en elle la possibilité d’étendre son influence en dehors de son Gau. Pour toutes ces raisons, le régime nazi avait décidé d’identifier ces Volksdeutsche perdus et de les ramener dans son giron.

Le rôle de l’ambassade luxembourgeoise à Paris

L’ambassade du Grand-Duché à Paris devint l’épicentre de cette opération, puis de la collaboration luxembourgeoise en France. Son chancelier, Théodore S., avait pris ses distances avec l’ambassadeur, Antoine Funck, qui était resté fidèle au gouvernement en exil et s’était installé à Vichy pour y représenter ce dernier. S. s’était pour sa part rangé du côté de la Commission administrative, qui avait choisi de collaborer avec le Reich. Lorsque l’éphémère gouvernement de fait avait été dissout, Théodore S. était devenu un fonctionnaire de l’administration civile allemande au Luxembourg.

En tant que tel, il réunit les notables de la communauté luxembourgeoise en France, au mois de décembre 1940, pour discuter avec eux de la nécessité de créer une section de la VdB. Rien n’était ressorti de cette réunion, mais une autre eut lieu quatre mois plus tard. Durant celle-ci, Théodore S. fit valoir que la France était vaincue et que le Luxembourg serait, quoi qu’il arrive, annexé par l’Allemagne. Dans ce cas, pourquoi refuser de s’engager dans la VdB et dans la collaboration, d’autant que cela ne manquerait pas d’avoir des avantages?

„Sie werden wie Reichsdeutsche betrachtet und habt alle Avantagen“, aurait-il alors déclaré, selon un témoin: „Ihr, die Ihr die Geographie und die Topographie von Frankreich gut kennt, Ihr könnt helfen den Krieg abzukürzen, Ihr werdet sicher ein Gehalt bekommen, das demjenigen eines Divisionsgenerals gleichkommt.“[1]

L’Ortsgruppe française de la VdB fut finalement fondée le mois suivant, en mai 1941. Un certain Dietzler, dont Simon venait de faire son Beauftragten des Chefs der Zivilverwaltung für Luxemburg in Frankreich, fut chargé de son organisation. La section commença certes à recruter, ce ne fut toutefois qu’après sa reprise en main par le parti nazi que le nombre de ses adhérents commença à croître, passant de 400 en novembre 1941 à 1.200 au mois d’août 1944.

Des collaborateurs de premier choix

Certains des Luxembourgeois en France étaient bel et bien sensibles à l’„appel du sang“, aux objectifs du nazisme ou aux opportunités que le Reich promettait de leur offrir. Ceux-là jouèrent un rôle non négligeable dans la collaboration en France. Maîtrisant aussi bien le français que l’allemand, connaissant bien leur pays d’adoption, ils étaient des auxiliaires de premier choix pour les autorités d’occupation.

Si la plupart d’entre eux furent engagés par la Wehrmacht, la Sipo-SD ou l’Organisation Todt, d’autres œuvrèrent pour le Reich au sein de structures parallèles.

Pas tout à fait soldats, pas tout à fait bandits, pas tout à fait Allemands non plus d’ailleurs, ils évoluaient dans une zone grise où se mêlaient pègre et polices parallèles et où l’idéologie s’arrangeait avec l’appât du gain.

Le Luxembourgeois André Folmer et l’Italo-luxembourgeois Dante Vannucchi étaient de ceux-là. Ils avaient créé l’un des principaux bureaux d’achat actifs en France et en Belgique occupées. La première fonction de ce bureau était d’acheter sur le marché noir des matières premières, mais aussi de produits de luxe, en gros volumes, puis de les acheminer en Allemagne. Il faisait toutefois aussi office de réseau de contre-espionnage, chargé de repérer et d’infiltrer les organisations de résistance. Il fut à ce titre responsable du premier grand coup de filet en zone occupée.

Le sens du vent

Les collaborateurs convaincus étaient toutefois une minorité parmi les Luxembourgeois de France. La plupart de ceux qui, parmi eux, adhérèrent à la VdB n’étaient pas des idéologues. Une majorité vivaient en région parisienne, où leur ambassade pouvait les contrôler de plus près. C’est de là que la VdB commença à établir un registre des Luxembourgeois de France, à partir de novembre 1941.

Ceux dont l’adresse avait été identifiée étaient d’abord inondés de brochures de propagande. Les plus hésitants étaient ensuite convoqués à l’ambassade, où Théodore S. et des agents allemands tentaient de les convaincre d’adhérer à la VdB. D’après les témoignages d’après-guerre, le chancelier d’ambassade cherchait plutôt à argumenter tandis que les Allemands n’hésitaient pas à user de menaces, notamment celle de leur retirer leurs laisser-passer pour se rendre au Luxembourg ou bien celle de les déporter à l’Est.

Beaucoup cédèrent donc à la pression. C’est du moins ce qu’ils dirent après la guerre, à une période où toute explication plus ambigüe aurait été dangereuse. D’autres raisons, moins avouables, jouèrent probablement aussi un rôle. Le seul qui, après la guerre, tint à peu près le même discours que celui qu’il avait tenu pendant l’occupation, fut Théodore S. Le 4 octobre 1945, il fit la déclaration suivante aux policiers qui l’interrogaient dans le cadre de l’épuration: „Si vous me demandez pour quelle raison je me suis laissé entraîner dans cette histoire, alors il me faut revenir aux années 1940 et 1941 et essayer d’expliciter ce qu’était réellement l’état d’esprit des Français mais aussi des Luxembourgeois. A cette époque Pétain était fort populaire en France. Collaborer avec les Allemands n’avait rien d’exceptionnel durant cette période. Les Français nous en auraient même voulu si nous avions donné matière à reproches. […] Je pensais sincèrement suivre le droit chemin. Il me semblait bel et bien en 1940 et 1941 que la France était à terre. Je m’imaginais qu’une confédération, soumise à l’autorité de l’Allemagne, verrait le jour. Au sein de cette confédération le Luxembourg, bien que sous une autre forme, aurait pu continuer à exister. Ce n’est qu’à partir de 1942 que j’ai compris quel malheur frappait l’Europe. A ce moment j’avais appris à connaître les Allemands.“[2]

Il avait surtout compris que le vent avait tourné. Quelques semaines après l’absorption de la section française de la VdB par le parti nazi, des événements considérables allaient changer le cours de la guerre.


[1] ANLux, Affaires politiques (AP) 45, témoignage d’Alphonse S., rapport d’enquête du 25 octobre 1945
[2] ANLux AP 45, interrogatoire de Théodore S. du 4 octobre 1945

Robert Hottua
28. November 2021 - 20.01

Guten Tag Herr Artuso, aufgrund der nicht anfechtbaren Parteinahme des lux. Episkopats für die menschenrechtsfreie Politik der arischen Rassenhygiene sind die (luxemburgischen) Katholiken in allen Ländern solange der Nazi-Ideologie verpflichtet, bis der Papst diese Verpflichtung offiziell aufhebt. Meine Mutter hat bis zu ihrem Tod 1974 an dieser Überzeugung festgehalten. Sie war regelmäßige Kirchgängerin und CSV-Wählerin. MfG Robert Hottua